Encore ce Kaysersguet !
L’entrée de la Robertsau présente le dernier témoin d’une « campagne » qu’entretenait la haute société strasbourgeoise du XVIIIème siècle : beaucoup de ces propriétés permettaient à ces familles d’échapper en moins d’une heure de trajet (il n’y avait pas de tram…) à l’univers urbain enserré dans nos fortifications où la taille des parcs d’agrément était forcément réduite.
Le domaine du Kaysersguet, du nom d’un de ses propriétaires fondateur des « Strassburger neueste Nahrichten » à la fin du XIXème siècle, présentait encore tous les attributs de ces campagnes, à savoir enceinte, demeure et parc avec ses ornements et fabriques ; aujourd’hui encore, malgré le vandalisme, tout peut encore être évoqué.
- Le mur d’enceinte ceignait la propriété protégeant ce bout de paradis : il a été éventré, une grille détruisant l’effet de monde à part, n’existant que par son portail principal et par une entrée de service bien malmenée.
- De la demeure, il n’en reste que l’évocation du volume, après l’adjonction arrière d’une construction récemment doublée d’une structure résolument « contemporaine ». La transformation de la façade au XIXème siècle, les percements maladroits de toiture après 1930 et l’évidement de son intérieur avec la disparition très récente de son escalier XVIIIème et de ses cheminées (mais où sont donc passés ces éléments … ?) expliquent tout.
- Le parc pourrait encore rappeler les temps passés, mais il sera bientôt trop tard. Le tracé en est connu, de même que ses ornements et fabriques dont la qualité mérite tous les efforts de préservation : un pavillon de jardin de style néoclassique (déplacé avec réduction du parc grâce au tram), un petit édifice orné d’une très fine tête de sanglier, une petite orangerie étaient complétés par une serre très menacée, mais dont les structures, certes XIXème, rappellent celles, disparues, d’autres châteaux comme celui de Schoppenwihr près de Colmar. Une glacière bien conservée avec sa voûte de briques moulées a perdu l’édicule qui la surmontait, point d’observation en hauteur du parc. Un puits, vandalisé lui aussi, complétait ce petit univers peuplé de huit statues de grande qualité de sculpture, un des intérêts essentiels du domaine. Abîmées par l’érosion du temps après la perte de leur enduit protecteur qui devait évoquer le marbre, vandalisées par les travaux actuels et leurs déménagements successifs, elles mériteraient une restauration et leur remise en place dans le petit parc avec ses chemins, ses bancs et autres pots sur socles.
On le voit, il reste beaucoup de persuasion à distiller pour que ce dernier témoin d’une « folie » du XVIIIème siècle puisse revivre, magnifiée … peut-être … par la réutilisation des locaux.
La réponse de la municipalité de Strasbourg à la requête de la Société Pour la Conservation des Monuments Historiques d’Alsace (SCMHA) est un « copier-coller » du courrier à une autre association, lettre peu rassurante surtout après le courrier très circonstancié de notre Société.
Cette Société œuvre depuis 1855 pour la sauvegarde du patrimoine alsacien, ayant regroupé à toutes les époques les personnalités les plus éminentes du monde de l’archéologie, de l’histoire et de l’histoire de l’art ; elle est à l’origine des collections du musée archéologique de la ville de Strasbourg et a présidé, avant la mise en place des services de l’État français après 1945, à la restauration de maint monuments insignes.
Actuellement, outre l’organisation de conférences et de visites, elle publie son bulletin annuel de grande qualité scientifique et surtout veut fédérer les efforts de protection du patrimoine en collectant les doléances des associations de défense pour les présenter efficacement devant les instances dont ses membres font partie.
Unissons nous !
Guy Bronner, Président de la SCMHA
NB : Pour adhérer à la Société pour la Conservation des Monuments Historiques d’Alsace, adresser votre demande à la SCMHA – 2 Place du Château (Palais des Rohan) – Cotisation annuelle : 30€