Non à l’infaillibilité industrielle
Le tremblement de terre qui vient de toucher Strasbourg et sa région, s’il a secoué arbres et bâtiments, a également secoué bien des certitudes. Il se produit quelques semaines après l’incendie de l’entreprise Lubriziol de Rouen dont les fumées laissent un goût amer aux riverains de l’usine.
Dans ces tristes circonstances les médias ont su jouer leur rôle et nous ont dévoilé force détails qui ne nous ont pas laissés indifférents. Ainsi beaucoup d’entre nous s’interrogent aujourd’hui encore sur la pertinence de la fiche d’information du public Seveso de l’entreprise Lubriziol dont voici les termes : « Les accidents pouvant entraîner une explosion sur les installations ont une probabilité d’apparition relativement faible (évaluée au maximum à une fois tous les dix ans) ». On connaît la suite. L’accident a eu lieu mais Lubriziol a accusé Normandie Logistique, l’entreprise voisine…
En 2014 l’ADIR (Association de Défense des Intérêts de la Robertsau) réagissait au projet de géothermie profonde prévu au port aux Pétroles. Elle soulignait d’une part la grande proximité de sept entreprises Seveso haut niveau de risque, d’autre part les risques sismiques liés à ce type d’exploitation. Les précédents existaient et en particulier le séisme du 8 décembre 2006 à Bâle (3,4 sur l’échelle de Richter) consécutif à l’injection d’eau sous pression à 5000 mètres de profondeur. Après avoir longtemps ferraillé l’ADIR a obtenu que la société Fonroche retire son projet.
Après le séisme qui vient de toucher nos quartiers, alors qu’un expert du CNRS ose mettre en cause ces mêmes forages géothermiques, l’entreprise dément fermement. Elle n’est en rien concernée…
A Strasbourg comme à Rouen les entreprises affichent toujours la même assurance et refusent dans tous les cas d’assumer leurs responsabilités. Elles font preuve de cette ubris, de ce manque de modération que condamnaient les Grecs dans l’antiquité, ubris qui accable l’homme au lieu de le libérer.
Conséquence plus importante encore, en refusant d’admettre qu’elles sont faillibles, ces entreprises nous donnent le sentiment que nous ne vivons plus dans une société du progrès, mais dans une société du risque.